C’est la rentrée scolaire dans beaucoup de pays, avec son lot d’inquiétude pour les parents d’élèves. A l’échelle mondiale, 74% des parents sont ainsi inquiets que leur enfant ne devienne victime de cyberharcèlement. On comprend pourquoi en sachant qu’à l’échelle mondiale, 80% des enfants sont victimes de harcèlement sur Instagram, et 58% des parents redoutent que leur enfant soit auteur de cyberintimidation.

Le harcèlement scolaire est souvent perçu comme une agression physique (pousser, donner des coups de pied, proférer une agression verbale, comme des menaces et des insultes désobligeantes). Preuve en est, le début de l’allocution d’Emmanuel Macron filmée en mode selfie sur le réseau social TikTok mercredi 31 août 2022 pour la rentrée scolaire : “Ces insultes, ces menaces, ces injures : trop d’entre vous les ont entendues à l’école, les subissent au quotidien.”

Cependant, une nouvelle étude de l’Université du Missouri met en évidence le bilan social et émotionnel dommageable causé par «l’agression relationnelle», qui est la forme la plus courante d’intimidation et implique l’exclusion sociale des pairs des activités de groupe et la propagation de rumeurs nuisibles. Le journal “Santé Magazine” a repris l’information dans un article intitulé “Le rejet, la forme la plus répandue de harcèlement scolaire”.

En effet, Chad Rose, professeur agrégé au Collège d’éducation et de développement humain de la MU et directeur du Mizzou Ed Bully Prevention Lab explique que « des études antérieures suggèrent que lorsqu’un enfant est exclu des activités sociales par ses pairs à l’école, les résultats pour cet enfant à court et à long terme seront tout aussi préjudiciables que s’il recevait des coups de pied, des coups de poing ou des gifles tous les jours. Cette étude met donc en lumière l’exclusion sociale à laquelle les jeunes sont souvent confrontés ».

Chad Rose a analysé les résultats de l’enquête qui faisaient partie d’une évaluation plus large du climat scolaire menée dans 26 collèges et lycées de cinq districts scolaires du sud-est des États-Unis. Plus de 14 000 étudiants ont été invités à indiquer s’ils étaient d’accord ou en désaccord avec des déclarations reflétant des attitudes pro-intimidation, une popularité perçue et une agression relationnelle.

Parmi les exemples d’énoncés de l’enquête, mentionnons « Un peu de taquinerie ne fait de mal à personne », « Je me fiche des choses méchantes que disent les enfants tant que ce n’est pas à propos de moi », « Dans mon groupe d’amis, je suis généralement celui qui prend les décisions. » et « Quand je suis en colère contre quelqu’un, je me venge en ne l’acceptant plus dans mon groupe.”

“Ce que nous avons trouvé, ce sont des enfants qui se perçoivent comme socialement dominants ou populaires qui approuvent les attitudes pro-intimidation, mais ne se perçoivent pas comme se livrant à une agression relationnelle“, a déclaré Rose. « Il y avait un autre groupe qui ne se percevait pas comme socialement dominant ou populaire, mais ils approuvaient des attitudes pro-intimidation et se livraient à une agression relationnelle. Ainsi, le premier groupe pensait que l’intimidation était acceptable, mais ne se considérait pas comme s’y livrant, même s’il excluait en fait les autres. Alors que le deuxième groupe qui a admis s’être livré à une agression relationnelle a peut-être exclu les autres pour tenter d’obtenir la position de dominant social et de grimper dans la hiérarchie sociale.”

Quant au troisième groupe, les enfants présentaient de faibles niveaux d’attitudes pro-harcèlement et d’agression relationnelle. L’étude les désigne comme des “non-agresseurs” ou “spectateurs”. “Ce qui est intéressant avec les spectateurs, c’est qu’ils perpétuent souvent le harcèlement, c’est-à-dire qu’ils servent de renforçateurs sociaux et sont là quand cela se produit”, a expliqué M. Rose.

Un conseil pratique est alors proposé par M. Rose aux enseignants qui peuvent le mettre en œuvre immédiatement : il s’agit d’intégrer les compétences en communication sociale dans leur programme quotidien.

“En plus d’établir des objectifs académiques pour les projets de groupe, les enseignants peuvent surveiller dans quelle mesure les élèves invitent les idées des autres à travers des conversations positives et encourageantes“, a déclaré Rose.

Les enseignants devraient faire des éloges spécifiques lorsqu’ils voient un comportement respectueux et inclusif en action, car l’enseignement et le renforcement de ces compétences sont tout aussi importants que les cours de mathématiques, de sciences et d’histoire.

Rose fait des recherches sur l’intimidation depuis 17 ans et s’est intéressé au sujet lors de son premier emploi après l’université en tant qu’enseignant en éducation spécialisée au secondaire travaillant avec des jeunes à risque qui se livrent à des comportements violents ou agressifs. Il explique que

L’intimidation ne commence ni ne se termine avec les cloches de l’école, c’est un problème communautaire. Je pense qu’en tant qu’adultes, nous devons être plus conscients de ce que nous enseignons à nos enfants et de la façon dont nous interagissons socialement, car les écoles sont le reflet de nos communautés.

Nous espérons donc que les écoles et les Etats sauront entendre cet appel à “commencer à intégrer des interventions spécifiques aux compétences, telles que la formation à l’empathie et les programmes d’apprentissage socio-émotionnel, afin de réduire les niveaux d’agressivité relationnelle chez les jeunes d’âge scolaire.”

Source :

« Sondage auprès des jeunes du secondaire sur l’agression relationnelle : impact de l’intimidation, du statut social et des attitudes » a été publié dans Preventing School Failure : Alternative Education for Children and Youth.