Pour une définition du cyberharcèlement et les démarches à entreprendre, consultez notre précédent article .
Créer le dialogue
Comme pour toutes les formes de harcèlement, le travail commence par la prévention — et celle-ci débute bien souvent à la maison. Le cyberharcèlement reste un sujet délicat pour beaucoup de familles : les parents ne savent pas toujours comment aborder la question sans inquiéter ou mettre mal à l’aise leur enfant.
La première étape, et sans doute la plus difficile pour l’adulte, est donc d’ouvrir le sujet. On peut parfois s’appuyer sur un article ou une actualité récente pour lancer la discussion :
« J’ai vu cet article dans 20 minutes qui parle du cyberharcèlement chez les jeunes, tu en as déjà entendu parler ? »
On peut aussi utiliser un film ou une série qui touche le public adolescent, comme Heartstopper, 13 Reasons Why ou plus récemment Adolescence, qui traite le sujet de façon plus sérieuse. Proposer de regarder ensemble (ou chacun de son côté) permet ensuite de discuter des différentes scènes et des réactions des personnages. C’est souvent un bon point d’entrée pour ouvrir le dialogue et comprendre où en est son enfant par rapport à ces questions.
Se rapprocher de l’univers du jeune, de ses références et des médias qui l’intéressent permet non seulement de capter son attention, mais aussi d’éviter un abord trop frontal s’il n’est pas prêt à parler de sa propre expérience. Et s’il n’est pas prêt à en discuter — que ce soit de son cas ou de celui de ses amis — on ne force pas. Mais c’est alors le bon moment pour faire un peu de prévention, en transmettant quelques informations essentielles :
- Ce qu’est le harcèlement, si le jeune n’est pas au clair.
- Si vous avez déjà abordé le sujet, rappeler que les mêmes comportements sont inadmissibles en ligne : chantage, insultes, diffamation, harcèlement sexuel.
- La victime n’est jamais responsable des violences subies. Elle a le droit d’être entendue et aidée.
- Le droit à l’image : on ne publie pas de photos d’autrui sans son consentement.
- On ne partage pas non plus les photos ou vidéos reçues à des tiers.
- Le rôle crucial des témoins : encourager à parler à un adulte si quelqu’un de son entourage est touché.
- L’importance de ne pas dévoiler d’informations personnelles en ligne (adresse, numéros de téléphone, mots de passe, etc.).
Et surtout, assurez votre enfant de votre présence, sans jugement ni culpabilisation, pour toute question ou difficulté qu’il pourrait rencontrer.
Prévenir sans culpabiliser
Aujourd’hui, la prévention autour du cyberharcèlement se concentre encore trop souvent sur les potentielles victimes et sur les moyens de se protéger : ne pas envoyer de photos intimes, ne pas partager d’informations personnelles…
Bien sûr, il est essentiel de parler de ces risques, mais attention à ne pas adopter un discours moralisateur.
👉 Le problème, c’est celui ou celle qui harcèle, pas celui ou celle qui subit.
Imaginez si, face au harcèlement de rue, on reprochait à une personne la manière dont elle est habillée ou l’image qu’elle renvoie. Cela ne passerait pas. C’est exactement la même chose en ligne.
Alors, on bannit les remarques du type :
« Tu n’aurais pas dû envoyer ça » ou « En même temps, vu ce que tu postes… »
L’enjeu est d’accompagner, pas de blâmer.
Et il ne faut pas oublier que votre enfant peut aussi être dans une autre position : non pas celle de la victime, mais celle de l’auteur.
Ce que les parents doivent garder en tête
- Respecter les limites d’âge des plateformes. Elles existent pour une raison et permettent de réduire certains risques.
- Adapter la surveillance à l’âge. Selon l’âge de l’enfant, vous avez le droit de savoir ce qu’il fait sur Internet et avec qui il échange. Pour les plus jeunes, certains parents choisissent d’accéder à leur téléphone — mais jamais en cachette, toujours en l’informant clairement. Les règles peuvent varier d’une famille à l’autre, mais l’important est qu’elles soient discutées et expliquées en amont.
- Restez à jour. Vous n’avez sûrement pas grandi avec les mêmes technologies que vos enfants, mais il est important de rester informé. Renseignez-vous sur les réseaux qu’ils utilisent et sur leurs caractéristiques : anonymat, messagerie de groupe, etc. Cela vous rend non seulement plus crédible, mais vous permet aussi de donner des conseils adaptés.
- Attention à la barrière de la langue. Certains parents accèdent à des messages sans réagir, simplement parce qu’ils ne comprennent pas le langage utilisé. Les codes changent vite et ce qui paraît anodin peut être très violent. L’objectif n’est pas de tout contrôler, mais de savoir repérer quand un mot est utilisé pour blesser ou rabaisser.
À ce sujet, Allianz France a récemment lancé une campagne de sensibilisation autour du langage des jeunes. Elle reprend la signification de plusieurs expressions, émojis et symboles utilisés aujourd’hui — une ressource utile pour les parents qui souhaitent rester connectés sans être intrusifs.
Signification détournée des expressions et symboles- Campagne Allianz
Allianz France. (n.d.).
Quelques significations supplémentaires
Mot Signification détournée
Bot : Insulte pour dire que quelqu’un est nul, lent ou incompétent.
Cringe : Quelqu’un ou quelque chose de gênant, ridicule ou inauthentique.
Nude : Référence au sexting, que ce soit au format image ou texte.
Ratio : Signifie qu’on se fait humilier ou ridiculiser, souvent sur les réseaux.
L : Abréviation de loss (perte) : désigne quelqu’un qui a échoué ou s’est fait humilier.
Pick-me : Fille perçue comme voulant plaire à tout prix aux garçons. Terme critique entre filles.
Simp : Garçon trop gentil ou trop attentionné envers une fille, vu comme « soumis ».
Karen : Femme perçue comme autoritaire, reloue ou exigeante, souvent moquée.
🍆 Sexe masculin, utilisé dans les sextos ou moqueries.
🍑 Fesses, sexualisation du corps (commentaire sur l’apparence).
💦 Éjaculation ou excitation (souvent avec 🍆 ou 🍑).
👅 Sexe oral ou désir sexuel dans le contexte.
Quelques ressources pour entamer le dialogue
Pour les plus jeunes :
Prix « Non au harcèlement » 2019 : https://www.youtube.com/watch?v=6SlD5kKiBFg
C’est quoi le cyberharcèlement ? (Épisode 653) – 1 jour, 1 question : https://www.youtube.com/watch?v=zUW3JyLtYsQ
Ados et préados :
Sensibilisation au cyberharcèlement – Académie d’Amiens : https://www.youtube.com/watch?v=kQhJmErUUlM
Séries populaires chez les jeunes qui abordent de près ou de loin le sujet :
Heartstopper (2022–2023)
13 Reasons Why (2017–2020)
Euphoria (public très averti) (2019)
Adolescence (2025) (plutôt pour les parents ou grands adolescents)
Sources
Allianz France. (n.d.). Nos actions contre le cyberharcèlement. Allianz France. Retrieved June 13, 2025, from https://www.allianz.fr/qui-est-allianz/allianz-s-engage/dans-la-societe/nos-actions-contre-le-cyberharcelement.html
Heartstopper :
Oseman, A. (Writer), & Lyn, E. (Director). (2022–2023). Heartstopper [TV series]. Netflix.
13 Reasons Why :
Yorkey, B. (Creator). (2017–2020). 13 Reasons Why [TV series]. Netflix.
Euphoria :
Levinson, S. (Creator). (2019– ). Euphoria [TV series]. HBO.
Adolescence :
Thorne, J., & Graham, S. (Créateurs). (2025). Adolescence [Série télévisée]. Netflix.
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